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Le Troisième concerto de Paganini joué en Suisse pour la première fois

Le Troisième concerto de Paganini vient d'être joué en Suisse, probablement pour la première fois, grâce à Alexandre Dubach, violoniste de Thoune dont les qualités humaines, musicales et artistiques sont parlantes.

 

Propos recueillis par Nicole Coppey 

Le concerto a été joué lors de trois concerts au début décembre à Berne, Worb et Thoune. Alexandre Dubach y était accompagné par le Berner Konzertorchester, sous la direction de Michel Biedermann.

 

Alexandre Dubach, merci d’accepter cette rencontre dans votre emploi du temps. Pourriez-vous nous parler de votre parcours, vos débuts.....

J’ai toujours rêvé jouer du violon. J’avais vu un clown au cirque ou les vitrines à l’école de lutherie de Brienz. Mes parents m’emmenaient écouter des orchestres. La création humaine du violon, sa forme, le jeu avec l’archet et la corde en vibration, tout cela me fascinait. Mon premier violon, je l’ai reçu à Noël et j’ai commencé les cours chez Elisabeth Schöni à Thoune. Par la suite, j’ai eu également comme professeurs Ulrich Lehmann, Yehudi Menuhin que j’ai connu à 11 ans, Arthur Grumiaux, Nathan Milstein mais aussi Magda Lavanchy élève d’Eugène Ysaye et Salvatore Accardo. Mes parents étaient très artistes, mon Papa comme photographe et ma Maman au piano. Ma sœur, pianiste, m’a toujours accompagné, entre autre pour le concours de l’Expo Nationale Suisse de 64 où nous avons gagné le 1er prix. J’avais alors 9 ans.

 

Et alors tout s’est enchaîné...

Oui, le 1er grand concerto, c’était celui de Mendelssohn que j’ai joué à 15 ans avec l’orchestre de la Tonhalle de Zürich. J’y suis d’ailleurs revenu quelques années plus tard, comme Konzertmeister.

 

Vous êtes un des rares violonistes à proposer en concert l’intégrale des 24 Caprices de Paganini. Vous affectionnez particulièrement ce compositeur ?

Absolument ! Niccolo Paganini, c’est le virtuose, le personnage brillant d’une Italie à l’origine des grands développements du violon, berceau de la lutherie aussi. Pour moi les 24 Caprices c’est de la grande musique, même si à l’origine Paganini les a conçus comme des études de travail dans lesquelles il a concentré beaucoup de difficultés techniques extrêmes et de nouveautés. Il n’y a rien qui soit injouable dans cette musique là. Il faut trouver les bons doigtés, les coups d’archet, il faut savoir comment les apporter avec humour, avec musicalité et quand on pense à la musique,  les problèmes techniques se résolvent.

 

Au delà des prouesses des 24 Caprices, la critique a abondamment salué votre interprétation pour Claves de l’intégrale des six Concertos de Paganini avec Lawrence  Foster et Michel Sasson à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo. Cette intégrale fait aujourd’hui référence, mais ce n’était pas acquis d’avance ...

Effectivement, puisqu’à l’origine nous voulions enregistrer seulement les n° 1 et 4. Pour les autres concertos cela a été très difficile de trouver le matériel d’orchestre, surtout pour le 5 et le 6. On a dû chercher dans plusieurs pays jusqu’à Washington même. Finalement on les a trouvés à Sienne et à Gênes. La partition d’orchestre du 5e Concerto était en partie illisible. Pour sauver l’enregistrement, j’ai dû recopier moi-même certains passages à la main. Pour le 3 e, écrit en 1826 et redécouvert en 1971, c’était aussi assez compliqué. Finalement tout s’est bien passé et la collaboration fut très agréable, même s’il ne restait que très peu de temps pour enregistrer.

 

Et c’est le troisième que vous jouerez prochainement. Pourquoi ce choix ?

Je crois qu’il n’a pas encore été joué en Suisse. C’est peut-être une première. C’est pour cela que j’ai proposé celui-là. En plus, je trouve que c’est le plus beau et le plus délicat, même si c’est certainement aussi le plus difficile.

 

Vous n’hésitez pas à jouer avec le Brass Band Berner Oberland, ou à tenir le rôle du tzigane musicien dans un théâtre. Vous avez d’ailleurs été particulièrement apprécié dans une prestation avec un jongleur. C’est le côté clown de cirque de votre enfance qui resurgit ?

Peut-être ! Nous avons fait cette expérience avec le jongleur Criselly à Wetzikon en 1998. C’est vrai que cela sortait des schémas traditionnels. C’est important d’innover et de renouveler les genres. La musique de notre époque doit aussi être jouée. J’ai créé récemment le Concerto 'La  clairière' de François Pantillon et également la musique de Urs Joseph Flury.

J'accorde aussi beaucoup d’importance à l'enseignement: donner quelque chose de sa propre expérience est important et inspirant, que ce soit par un enseignement régulier à Sion,  mais aussi par des masterclasses en Italie, en Allemagne ou à Zurich.

 

Et les musiciens ?

La musique est comme un miroir de l’âme du musicien. J’ai une admiration particulière non seulement pour les violonistes célèbres de grand renom mais aussi pour les musiciens peu connus et qui sont en même temps des musiciens exceptionnels desquels on apprend beaucoup. Ils sont une inspiration personnelle. J’ai été très touché d’être invité à jouer dans les pays de l’Est, des pays pauvres et avec tant d’excellents musiciens.

 

Photo M. Bandion

 Donner quelque chose de sa propre expérience est important et inspirant.

 

Vous pouvez lire l'article dans la RMS 12 / 2007