Voici 30 ans disparaissait Edgar Willems à l'âge de 88 ans. En
hommage à ce grand pédagogue et artiste, il est important de retracer les lignes
principales de son œuvre et de ce personnage énigmatique, musicien autodidacte
passionné de philosophie, qui n'hésita pas à se plonger à la recherche de
l'essence des choses.
Développant une philosophie profonde sur laquelle sont établies les prémisses
de son éducation musicale, il a su tisser des relations unissant les éléments
essentiels de la musique (son, rythme, mélodie, harmonie) avec la personnalité
humaine (sensorialité, motricité, affectivité, intellect). Ces principes, d’une
extrême universalité, profondeur et élévation, ont débouché sur une œuvre qui
met en évidence la composante humaine des phénomènes musicaux décrite dans son
livre Les bases psychologiques de l’éducation musicale.
Pour en saisir
la dimension, il suffit de se pencher également sur d’autres ouvrages de
référence : Le rythme musical, L’oreille musicale, La préparation musicale
des tout-petits, etc. Relevons qu’à chaque lecture, les perceptions de ses
messages sont de plus en plus intenses, et qui veut porter réflexion y trouvera
des valeurs fondamentales.
Selon Edgar Willems : « La musique est à considérer comme un facteur important de la formation de la personnalité humaine. Non seulement parce qu’elle crée un climat particulièrement favorable à l’éveil des facultés créatrices, mais encore parce qu’elle peut vivifier la plupart des facultés humaines et favoriser leur développement ».
Edgar Willems et enfants
« L’éducateur doit pouvoir aider l’élève à s’ouvrir au message humain de la beauté musicale. »
Développer l’audition intérieure
Considérée comme telle, la musique révèle tout son caractère artistique
puisqu’elle habite l‘être tout entier… Ces résonances ont vibré au cœur de
l’artiste et du pédagogue que fut Edgar Willems car, et toute son œuvre le
démontre, il faisait preuve de plusieurs degrés de perception et de
transmission, que ce soit avec le corps, le cœur, l’âme ou l’esprit. Son souci
permanent du développement de l’« audition intérieure » est d’une force
incroyable.
Dans cette quête, Edgar Willems donnait une place privilégiée au
chant : « Le chant joue le rôle le plus important dans l’éducation musicale des
débutants : il groupe de façon synthétique – autour de la mélodie – le rythme et
l’harmonie ; il est le moyen le meilleur pour développer l’audition intérieure,
clé de toute vraie musicalité. »
Audition, rythme, harmonie, travail
corporel et vocal, improvisation, expression, composition, autant de thèmes
chers au pédagogue et qui sont à la base de l‘équilibre et de la progression
musicale et personnelle.
Harmoniser savoir, sensibilité et action
« La musique enrichit l’être humain par le pouvoir du son et du rythme, par les vertus propres à la mélodie et à l’harmonie ; elle élève le niveau culturel par la noble beauté qui se dégage des chefs-d’œuvre ; elle donne réconfort et joie à l’auditeur, à l’exécutant et au compositeur. La musique favorise l’élan de la vie intérieure et fait appel aux principales facultés humaines : la volonté, la sensibilité, l’amour, l’intelligence et l’imagination créatrice. Aussi, la musique est-elle envisagée presque unanimement comme un facteur culturel indispensable. A certains points de vue, l’éducation musicale se différencie de l’enseignement musical traditionnel. C’est une des tâches de la pédagogie nouvelle d’unir judicieusement les aspects artistiques et scientifiques de la musique, et d’harmoniser le savoir, la sensibilité et l’action. Vie et formes, culture et technique, doivent se compléter dans l’éducation musicale pour contribuer à l’avènement d’un nouvel humaniste, conforme aux besoins de l’époque moderne. »
Son incroyable ouverture d’esprit et sa perception aiguisée de l’autre lui tracent un parcours d’une grande richesse, avec des rencontres déterminantes de pédagogues, artistes, danseurs, grands musiciens, chefs d’orchestre, chanteurs, etc. dont on peut citer Duncan, Stravinski, Hindemith, Bartók, Prokofiev ou Ansermet. Chaque situation le mène à une réflexion qui va à son tour produire des caractéristiques « willemsiennes », comme : la musique est pour tous ; les débuts sont fondamentaux ; la musique c’est la vie, il faut la vivre.
Alors que la tendance des années vingt était à la réorientation de l’art, de la philosophie, de la psychologie ou de la pédagogie, et où plusieurs théories musicales virent le jour, Edgar Willems ne s’est pas limité aux seuls aspects théoriques. Il a aussi su trouver les éléments pratiques nécessaires à son application. Toute sa progression pédagogique a été étudiée avec une finesse et une authenticité totalement pensées pour une juste progression musicale. « En musique et en art, il ne suffit pas seulement de savoir ou de comprendre. Il faut tout d’abord vivre et sentir », disait-il. Pour lui, la musique est dans l’être humain, en harmonie avec l’univers.
S’ouvrir au message humain de la beauté musicale
Il disait encore : « L’éducateur conscient de sa mission, se rend compte que l’art est une des plus hautes activités de l’homme. Il doit pouvoir aider l’élève à s’ouvrir au message humain de la beauté musicale. L’art devrait donc toujours avoir une signification humaine ; tout grand artiste tend, consciemment ou inconsciemment, vers l’expression de cette unicité que représente l’être humain. »
Sur la base d’une philosophie comme la sienne, il va sans dire que l’éducation musicale proposée par Edgar Willems contribue à l’épanouissement complet des facultés humaines et spirituelles. Il s’agit là d’une intégration active et réceptive du monde sonore. Les principes de son éducation musicale sont finement pensés dans la progression musicale la plus adaptée aux enfants. Le travail de l’expression et celui de l’improvisation sont également des points extrêmement forts de la démarche proposée.
La grande sensibilité qu’il éprouve pour les autres arts démontre bien qu’il fut une personnalité pensante, perméable, inspirée, ouverte, réfléchie et extrêmement perceptive aux facultés de la personne. La globalité proposée démontre également ce mode de pensée : « il y a de tout dans tout ».
Là où Edgar Willems mérite le plus grand respect, c’est que toute sa vie et son œuvre ont été consacrées à chacune de ses thèses et à leur application. Comme pédagogue et artiste à part entière il « était » musique, il « était » pédagogie, et vivait entièrement et pleinement pour cette cause humanitaire. Cette réflexion profonde devrait inciter les générations suivantes à transmettre à leur tour cet héritage de grande valeur.
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Voici 30 ans disparaissait Edgar Willems à l'âge de 88 ans. En hommage à ce grand pédagogue et artiste, il est important de retracer les lignes principales de son œuvre et ... >> suite
Eine Hommage an Edgar Willems.
Übersetzung: Philipp Zimmermann
Vor 30 Jahren ist der grosse Pädagoge und Künstler Edgar Willems im Alter von 88 Jahren gestorben. Als musikalischer Autodidakt und passionierter Philosoph verstand es diese faszinierende Persönlichkeit, die Grundelemente der Musik (Klang, Rhythmus, Melodie, Harmonie) mit der menschlichen Persönlichkeit (Sinne, Motorik, Affekt, Intellekt) in Einklang zu bringen, was nicht zuletzt zur Publikation seines Buches Die psychologischen Grundlagen der Musikerziehung geführt hat. Daneben hat er weitere Referenzwerke veröffentlicht, wie Der musikalische Rhythmus, Das Musikgehör, Hinführung von Kleinkindern zur Musik etc., die auch heute noch bei jeder Lektüre zu fesseln und anzuregen vermögen.
Edgar Willems mass dem Singen grundlegende Bedeutung bei: «Singen ist von grösster Wichtigkeit in der Musikausbildung von Anfängern: es ordnet den Rhythmus und die Harmonie auf organische Weise um die Melodie herum an und ist das beste Mittel zur Entwicklung des inneren Hörens, dem eine Schlüsselfunktion für jede wahre Musikalität zukommt.»
Sein unglaublicher geistiger Horizont und seine scharfe Wahrnehmungsgabe eröffneten ihm ein reiches Leben und brachten prägende Begegnungen mit Persönlichkeiten wie Isadora Duncan, Igor Strawinsky, Béla Bartók, Sergej Prokofjew, Ernest Ansermet und anderen.
Jede Situation brachte ihn zum Nachdenken, was zu den «Willemsischen» Charakterisierungen führte, wie zum Beispiel: Musik ist für alle da; die Anfänge sind grundlegend; Musik ist das Leben, man muss sie leben. Während sich andere auf die theoretische Reflexion beschränkten, war Willems’ Devise immer: «In der Musik und in der Kunst reicht blosses Wissen oder Verstehen nicht aus. Von grösster Wichtigkeit ist das Erleben und Erfühlen.» Als Vollblutpädagoge und -künstler «war» er Musik, «war» er Pädagogik und lebte voll und ganz für diese humanitäre Sache.